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Le congrès de CUBA:
Las Tunas
du 21 au 24 Nov. 96
Départ prévu pour 13h30 en bus de chez
Roberto Pujals, 83 ans, le doyen des magiciens de la
région, maître de magie (maestro) et marchand
de trucs connu. Une trentaine de magiciens de la compagnie
de Santiago sont présents. Comme beaucoup font de la
scène (magia de escenario), ils sont nombreux
à être accompagnés de leur jolie
partenaire. Du coup, Stone a déjà rangé
ses pièces pour une approche à la
française de ces demoiselles. Bien que ne parlant pas
un seul mot d'espagnol, il y réussit fort bien, sans
doute aidé par le rhum qui circule à foison.
L'ambiance est à 100% magique et pièces,
boules, cigarettes, foulards et bouteilles de rhum
apparaissent et disparaissent en attendant le bus qui
n'arrivera qu'à 21h00!
A la cubaine comme on dit ici.
Las Tunas est à environ 200 km de Santiago. Le
trajet, dans un bus défoncé et archi
bondé de guéridons, valises, colombes,
canards, lapins et magiciens, n'est pas de tout repos. Ca
chante, ça crie, ça promet quoi. Vingt minutes
après notre départ, le bus s'embourbe. On sort
dans la nuit pour le pousser sous une pluie chaude: gadoue,
rires, rhum et cris de victoire quand nous repartons. Nous
arriverons à 2h du matin.
Jeudi 21 Novembre
Dès 10 heures se tient un colloque dans une salle
d'exposition au coeur de la ville. Sur le chemin, nous
croisons un magicien de rue qui officie devant une
quarantaine d'enfants en uniforme (ils sont à
l'école). Le thème du colloque: La Magie et
son avenir dans les année 90. Stone ne comprend rien,
nous entamons une promenade qui nous fait rencontrer une
animatrice de Radio Victoria. Elle décide de nous
interviewer pour une émission sur le congrès
de Tunas qui sera diffusée au niveau national.
A 15h30 se déroule le gala d'ouverture
dans un théâtre, avec un seul numéro:
Circe Martinez et Justo Salas. Un
numéro de 15 mn durant lequel ne sont
présentés que deux effets: une boule volante
(fil) et sa disparition (fake dans le foulard). Circe est
une magnifique brune à la chevelure ondulante et aux
yeux très noirs. Son numéro exprime une
multitude de sentiments différents et parfois
opposés: douleur, haine, amour, plaisir, rires,
pleurs. C'est plutôt une pièce de
théâtre à laquelle s'est greffé
de la magie. A la fin du numéro, les artistes
reviennent sur scène et entament un débat avec
le public qui porte sur le numéro. Ils commencent par
justifier les actions de leur personnage puis les
spectateurs donnent leur avis sur ce qu'ils ont le plus
apprécié, le moins aimé ou pas compris
du tout. C'est un véritable travail de construction
à vif qui dure plus de deux heures. Tout le monde
prend des notes, public et acteurs du numéro... Ils
nous proposent ensuite de passer sur scène afin
d'effectuer un exercice particulier: ne rien faire et
surtout ne rien exprimer durant trois minutes. Un seul
numéro à ce gala d'ouverture, mais quelle
richesse. Je crois que cette formule est très
intéressante et la remise en question du
numéro qu'elle suscite est à méditer.
Ce n'est pas la technique qui est travaillée, mais sa
place au sein du numéro et sa justification dans la
mise en scène.
21h00: Gala d'inauguration, au théâtre
Tunas, avec la compagnie de danse de Las Tunas et des
comiques-travestis (et drôlement cascadeurs) de
Santiago de Cuba. Le gala débute avec Humberto
Mana dans un numéro de magie
général (peu rodé mais très
joli) avec productions de cannes, cartes et verres entre des
foulards ; en leitmotiv, apparitions de petites bouteilles.
Il enchaîne avec des productions de cartes
géantes derrière lesquelles il fait
apparaître de grosses bouteilles. Enfin, apparition
d'un plateau avec trois bouteilles de champagne,
dédoublement du plateau et des bouteilles et
apparition d'une bouteille géante en finale.
Chaplino exécute un numéro en
Charlot. Il débute avec les mimiques de Chaplin. Il
aperçoit une poubelle dans laquelle il trouve les
objets qu'il va utiliser et tombe sur un hamburger. Il jette
le hamburger et conserve l'emballage qu'il commence à
manger. C'est le prétexte pour une production de
ruban à la bouche. Il enchaîne sur une boule
zombie trouvée dans la poubelle. Avec quelques gags
et jeux de mimes, il entame les boules excelsior, mais avec
la boule zombie ; joli succès car les boules sont
énormes et il termine avec cinq boules
géantes.
Mago Piter: "Le magicien de Las Tunas", connu des
petits comme des grands et organisateur du congrès,
nous gratifie d'un numéro de télépathie
avec un partenaire aux yeux bandés. Son numéro
commence doucement pour finir sur un rythme endiablé
lorsqu'il descend dans le public.
Américo Lorenzo: classique, très
classe et très beau. Apparition de cannes, feu,
fleurs de papier et collier de fleurs, production
d'ombrelles. Il termine par la production d'un vase duquel
s'échappent des flammes qui se matérialisent
en fleurs géantes multicolores. Très joli
(surtout quand on sait comment et avec quoi les cubains
fabriquent leur matériel).
Après le gala, nous nous retrouvons dans un
magazin d'objets d'art où se déroule la foire
aux trucs (beaucoup sont fabriqués par Alberto et
Manuel Gasco). Il faut cependant savoir qu'un bon stand dans
un congrès français possède plus de
matériel que toute la foire aux trucs de ce
congrès ! De plus les prix sont effarants, exemples:
le tour des cinq billets inépuisables: 5 F, la petite
voiture de Tamariz: 10 F, une cage à a apparition
(partenaire, fauves...): 355 F !!!
Vendredi 22 Novembre
10h00: conférence de Xévi, magicien
espagnol, sur la Magie pour enfants. Je n'ai pas pu y
assister.
L'après midi se tient la suite du
colloque entamé la veille, ainsi que les
répétitions des numéros de concours,
car le gala est public et télévisé.
21h00: Première partie des concours de
scène. A ma grande déception, il s'agit des
mêmes numéros que ceux de la veille, sauf
José Valdivia qui présente, entre
autre, une très belle boule volante à fil.
Mais c'est le dernier concurrent, Eduardo Torres qui
va se distinguer complètement et faire un triomphe.
Un numéro de colombes très classique, mais
à couper le souffle, avec des productions "ultra
clean": colombe au foulard, foulard en feu et canne, une
colombe apparaît sur la canne. Il enchaîne avec
des mani-pulations de cartes (aux back and front très
propres) suivies de la production d'une colombe entre les
éventails de cartes. Production de foulards, puis
dédoublement ; apparition d'une colombe et
dédoublement de la colombe à vue et à
mains nues. Colombe en foulard ; il termine par la
production de deux canards. La salle est en délire.
Stone en a les yeux qui lui sortent de la tête tant le
rythme est rapide et les productions "super clean". Le
public lui fait un triomphe puis une standing ovation ;
bravo Torres!
Samedi 23 Novembre
10h00: je pars pour le théâtre Raul Gomez
où je fais un spectacle pour les enfants avec les
magiciens de la compagnie de Santiago (dont le directeur est
Eduardo Maretinez, magicien du Tropicana de Santiago et
heureux papa de Circe Martinez). Torres y refait son
numéro et je suis autant bluffé que la veille
par la propreté de ses techniques.
A la même heure, mais dans un autre
théâtre, se produisent les magiciens de
Camaguay, pour les enfants également.
15h00: débute le concours de close-up: 6
concurrents dont mon ami David Stone, au centre des arts de
Las Tunas.
Julio Velez: assis et en musique. Il débute
par une production de pièces suivi d'un matrix avec
quatre cartes. Il range une pièce dans sa poche, et
il en a de nouveau 4 dans la main. Il répète
l'effet plusieurs fois e suite, mais à la
troisième fois, la pièce ne revient pas ; elle
est allée dans l'étui de cartes. Puis notre
ami fait un break en produisant un verre de rhum. Il en
profite pour se servir un verre et la bouteille
disparaît (lapping). Julio termine sur une routine de
boîte Okito, la production d'une grosse pièce
et #en final, une pluie de petites pièces.
Américo Lorenzo: moitié
assis/debout, en musique. Il débute avec des gants
rouges. Il retire ses gants et l'on s'aperçoit qu'il
y en a un beaucoup plus petit que l'autre. Il le transforme
en balle éponge et sort deux gobelets de l'autre
gant. Trois petits bonshommes apparaissent du gobelet.
Américo en range un dans sa poche, et il y en a
toujours trois en main... (les cubains semblent très
priser cet effet). Il enchaîne sur des apparitions de
pièces rouges qui deviennent bleues, passent à
travers la table, remontent, et sont soudées entre
elles en finale. Il fait ensuite apparaître un gros
bonhomme (à l'image des petits, mais en mousse, 30 cm
environ). Il soulève le bonhomme et en retire les
trois pièces de tout à l'heure. L'une devient
géante, l'autre se transforme en petit bonhomme. Il
produit un petit verre qu'il propose au petit bonhomme.
Devant son refus (?) il le transforme en un grand verre
plein qu'il offre au grand bonhomme. Pour terminer, il
reprend la balle mousse du début qui devient
géante. Il la place dans les bras du gros bonhomme et
salut.
Juan Carlos Rambla: assis, en musique. Une routine
de dés. Production de gros dés sous les
gobelets. Technique moyenne ; il se représentera en
scène.
David Stone: debout, parlé. Le seul
numéro parlé ; 9 mn10 en espagnol alors qu'il
ne parle pas un mot de la langue, on a donc bien rit des
fautes de langage qu'il a fait. Apparition de 4
pièces d'un capuchon de stylo, chink a chink, puis
voyage de la quatrième pièce dans la main
d'une spectatrice. Une pièce devient géante,
voyage dans le stylo "porte monnaie" puis devient super
géante. Il fait un break pour montrer qu'il a de gros
chaussons aux pieds. Un jeu de cartes sort du capuchon. Il
en profite pour faire choisir trois cartes qui voyagent
respectivement, dans son portefeuille (en fait son stylo),
dans sa poche intérieure de veste de laquelle il sort
également sa chaussure qui manque à son pied
(il s'avère par la suite qu'il n'a pas de poche !).
La dernière carte voyage sur son front puis le jeu
entier disparaît dans sa poche. Une bonne
maîtrise de la misdirection ainsi qu'une très
bonne technique, mais parfois un peu trop rapide. Un
numéro bien rodé qui a eut beaucoup de
succès.
Humberto Mana: assis, en musique. Sous
prétexte d'en arriver au café lorsqu'il est au
restaurant, Humberto lit son journal, jette deux sucres dans
sa tasse et s'aperçoit qu'il en a toujours trois. Il
en jette un à un chien imaginaire et en a de nouveau
trois dans la tasse. J'ai trouvé la justification de
ce tour (au répertoire de tous les cubains)
très intéressante. Le magicien ne dit pas au
public: «Vous ne voyez pas comment je fais pour en
avoir toujours trois » mais: «Je ne
comprends pas, je jette un sucre et j'en ai toujours trois,
pourtant je n'en veux que deux dans mon café
». Puis des lunettes apparaissent pour lire son
journal. La tasse disparaît, puis revient et c'est la
soucoupe qui disparaît ou encore la cuillère.
Il termine par l'apparition d'un verre et d'une bouteille de
rhum derrière le journal (digestif oblige !). Un
numéro aux techniques très classiques, mais
très bien réfléchies.
Le dernier concurrent (dont j'ai oublié le nom) a
présenté une routine de dés qui
voyagent, changent de couleur et grossissent. Un
numéro que je n'ai malheureusement pas vu.
Un bon niveau en général, avec une magie
qui se veut originale, riche et variée. Avant chaque
passage, on fait passer un grand panneau devant la table
afin que les concurrents puissent préparer leur
numéro. Différentes tables sont
proposées aux candidats afin de déterminer la
hauteur qui leur convient le mieux et un tirage au sort
désigne l'ordre de passage. Dans l'ensemble, les
cubains ont tendance à faire apparaître une
multitude d'objets et aiment la magie efficace, forte et
très visuelle. C'est pour cette raison qu'ils
travaillent souvent assis (voire toujours). L'impression que
j'ai ressenti, et qui se confirmera par la suite, est que
les cubains font, en quelque sorte, de la scène en
close-up.
21 h00: suite des concours de scène, avec un
niveau d'ensemble moyen. J'ai pu voir la lévitation
la plus nulle de ma vie. Du coup, je n'ai pas noté le
nom des concurrents. A part Mago Carlos qui, dans un
numéro de manipulation de boules de billard m'a
impressionné par les difficultés techniques de
ses manipulations sans coquille. C'est cependant un
numéro encore confus et à roder. Xevi, le
magicien espagnol sort des rangs du public pour entamer une
chasse à la lumière (genre Mayoral ou Rocco
Silano). C'est sympa et ça détend. Il remonte
un peu dans mon estime car je l'ai rencontré
l'après midi et je n'ai pas du tout a accroché
; il semblait avoir la grosse tête.
22h30: Conférence David Stone. Cette
conférence lui avait été
réclamé peu après son arrivée,
mais il avait refusé, préférant
attendre la fin du concours. Deux heures de magie des cartes
et surtout... des pièces. Cela va du facile au
très technique. Une conférence" qui a beaucoup
plu. Je pense que le stylo "porte-monnaie" va faire des
adeptes!
Dimanche 24 Novembre
9h00: Je retourne faire de la magie pour les enfants de
Las Tunas. Ils sont aujourd'hui beaucoup plus nombreux que
la veille.
21h00: Gala de clotûre. C'est le dernier soir du
congrès et la salle est comble. Le spectacle est
filmé par canal dos, chaîne national cubaine.
On y retrouve notre ami Humberto Mana avec ses
bouteilles, Chaplino qui déclenche moins de
succès que la dernière fois, Manuel Gasco
dans une très jolie routine de production de
cravates. Son personnage est comme dans la vie: calme et
posé. Sa misdirection en est pas moins bluffante car
il produit pas moins de 15 cravates, à mains nues,
sans compter les cintres où sont à chaque fois
suspendues trois cravates. Un numéro très
original que j'ai beaucoup apprécié. Signalons
que Gasco est l'un des marchands de trucs de Santiago.
Il est suivi d'un numéro de
télépathie avec une partenaire sur
scène aux yeux bandés qui indique
infailliblement les objets que touche le mentaliste ainsi
que les dates de naissance sur les cartes d'identité.
Le mentaliste termine sa prestation en demandant à
quelqu'un du public de désigner une autre personne au
hasard et de lui confier un objet personnel (un stylo).
Cette autre personne va elle même porter l'objet
à quelqu'un d'autre dans le public. La partenaire du
mentaliste retrouve le type qui a
récupéré en dernier l'objet, trouve
qu'il s'agit du stylo, retrouve la seconde personne et le
prend par la main pour l'emmener rendre le stylo à
son propriétaire. Joli succès.
Ernesto Planas: président du juty et
magicien professionnel, il se produit surtout dans l'un des
deux plus grands cabarets de Cuba , La Maison (l'autre
étant le Tropicana ; ces deux cabarets sont
doublés à La Havane). Planas est le type
même du cubain, beau gosse, dents blanches et super
sourire (qu'il utilise d'ailleurs comme misdirection). Son
numéro est surtout basé sur les productions de
fleurs et d'ombrelles. On sent l'emprunte salsa de la
chaleur des cabarets cubain; cannes en fleurs, production de
fleurs à mains nues en dansant la salsa. Nombreuses
productions de fleurs en papier (genre Haïti). Il fait
ensuite des mouvements de toréador avec in foulard
afin de produire de nombreuses ombrelles. Il termine par la
production d'un parasol multicolore. Beaucoup de
présence, bonne technique, beau regard ; il
évolue à un moment avec quatre partenaires qui
dansent autour de lui. On sent le professionnel bien
rodé. J'aurai, chez lui, l'occasion de me rendre
compte qu'Ernesto est également un excellent close-up
man. (Il a remporté le Grand prix à Mexico en
1986.)
Mago Piter fait choisir trois cartes
géantes et effectue la houlette aux cartes alors
qu'il est dans le public. Succès moyen en raison du
manque de visibilité.
Eduardo Torres, visiblement très attendu du
public, fait enfin son apparition. Avec son assurance et son
sourire charmeur, il a déjà conquis le public.
Je vois son numéro pour la troisième fois et
je peux me rendre compte que tout est réglé au
centimètre près: sourire, pas, regard... c'est
effarant. Même succès, disons plutôt,
même triomphe car de nouveau, standing ovation. Je
sais que les cubains sont très bon public en
général, souvent très chaud (le rhum,
ça aide), mais Torres casse vraiment à chaque
fois la baraque.
On entame la remise des prix.
Résultats des concours de
scène
- 1er prix: Eduardo Torres (on l'avait
deviné).
- 2ème prix: Américo Lorenzo.
- 3ème prix: Juan Carlos Rambla.
Résultat du concours de close-up
- Grand Prix: David Stone.
- 1er prix: Américo Loreneo (Camaguay).
- 2ème prix: Humberto Mana (Camaguay).
- 3ème prix ex aequo: Juan Carlos Rambla
(Santiago) et Julio Velez (Camaguay).
Les gagnants repartent avec une sculpture sur corne, un
diplôme ainsi que la correction
détaillée par le jury de leur numéro
(ce qui est très pratique car chacun sait où
et quoi travailler, tant au niveau technique que
présentation). Les premiers prix gagnent 300 pesos,
soit l'équivalent de 15$ ! (Il faut savoir que le
salaire moyen d'un cubain peut se fixer aux alentours de
6$... au mois...)
La seconde partie du gala est assurée par
Xévi (Espagne) qui commence par les mouchoirs
coupés et raccommodés. Une présentation
très sympa et pleine de gags avec notamment la
panoplie des ciseaux qui ne coupent pas, se cassent, ne
s'ouvrent pas ou ne ferment plus... Dommage qu'il n'effectue
pas le change au regard croisé de Tamariz pour le
change final du mouchoir. Il présente ensuite le tour
du plateau à la carte. Générale-ment,
je m'endors juste après le forçage de la
carte... mais Xévi a une présentation
intéressante. On voit sur scène un clown
multicolore en contreplaqué (1m20 environ) qui tient
un plateau et porte un caleçon bariolé ainsi
qu'un chapeau doté d'une fleur. La spectatrice
choisit forcement le 5 de trèfle (!) qu'elle remet
dans le jeu géant. Xévi lui donne alors un
pistolet de gros calibre et l'installe dans le public afin
qu'elle vise le jeu de cartes (posé sur le plateau du
clown, ben oui...) Au premier coup, c'est la fleur du
chapeau qui saute, au second, c'est le caleçon qui
tombe et qui laisse apparaître les jambes poilus du
clown (gag garantie), au troisième coup, c'est le
plateau, mais c'est pas la bonne... et tralala.
Xévi enchaîne sur une
présentation de la chaise électrique où
un spectateur doit hypnotiser les jeunes femmes qui
s'assoient sur la chaise en imaginant qu'il les pique avec
une aiguille. La salle est bien sûr tordue de rire
quand c'est au type de s'asseoir sur la chaise ; de nombreux
gags. Il termine par les foulard XXème siècle
avec le soutien- gorge.
Malgré le manque de moyens mis à leur
disposition, les cubains m'ont énormément
impressionné par la qualité de leur travail
ainsi que l'amour qu'ils donnent à la magie. J'avais
affaire à de vrais passionnés qui se battent
pour continuer à promouvoir leur art. Il faut savoir
que le manque de moyens est hallucinant. Un jeu Bicycle,
c'est de l'or, surtout s'il est neuf ! J'ai vu le directeur
de la compagnie partager 20 mètres de cordes entre
tous les magos présents durant le trajet en bus.
Torres dont je vous parlais a dû tout construire dans
son numéro, jusqu'à son costume, ses cannes...
Il doit économiser pendant six mois pour pouvoir
s'acheter un canard ! Devant ce manque de moyens, on
pourrait penser qu'il y a abandon. Et bien non, ils
entretiennent une envie de gagner stupéfiante en
bossant des techniques de cigarettes, pièces, boule
de billard qui bluffent à mort. Et surtout, ils
travaillent avant tout la présentation ; le regard,
la misdirection (les cubains sont des malins...), le corps
(qu'ils dominent de par la salsa), la comédie...
Ce sont des acharnés qui ne peuvent assouvir
complètement leur passion. Ils n'ont pas de
conférence (qui se déplacerait pour deux
dollars ?), pas beaucoup de bouquins, rien quoi. Aussi,
quand vous les rencontrez et que vous leur montrez des trucs
nouveaux, ils sont prêts à échanger
leurs secret (et Dieu sait qu'ils sont bons...) pour un
moment de découverte avec vous. Je crois avoir
passé au sein de leur compagnie l'un des moments les
plus sensibles et les plus émouvants de toutes mes
rencontres magiques de par le monde.
Reportage de Jean-Charles ROSS
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